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1960 : scenario Un paysan à Paris (retranscription)

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Les 4 Vents n° 13 (Un paysan à Paris)

Réalisation : Jacques Krier

Une vache frisonne de 750kgs: un chef-d'oeuvre.
André l'astique avec amour à l'eau savonnée.
Il est heureux, il ne dit rien. Il passe la queue de la vache dans l'eau sucrée puis vernit les sabots au pinceau ainsi que les cornes.
Dans l'écurie très propre, les voisins admirent.
Silence coupé d'interjections respectueuses.
André peigne le poils à la tondeuse
La toilette de la vache est achevée
André traverse la cours de la ferme suivi par sa fille qui porte un seau et des brosses.
André entre dans le corps du logis.
Les voisins restent dans la cour.

Un paysan (off) : elle fera bien au councours

Un autre (off) : ils vont être épatés à Paris.

André dans la cuisine de la ferme enfile une chemise propre.
Sa femme vérifie les boutons.
Elle noue la cravate

Bruit de voix lointaines
Il a des chances, André. Dans le fond, ça fait plaisir que quelqu'un de chez nous ait été choisi pour présenter une bête au concours général...
Paris c'est la consécration pour lui
Ca lui revient de droit.

Femme : C'est le grand jour,
André : Paris
André : oh! tu sais, Paris
Femme : tout de même....
André : c'est plutôt une corvée avec tous ces papiers qu'il a fallu remplir... Et puis tout seul
Femme : les cousins viendront te voir... tu coucheras chez eux
André : ça fait 5 ans qu'on ne les a plus vus
Femme : tu leur a bien expliqué dans la lettre à quel endroit tu te trouverais au salon : c'est grand
André : ne t'en fais pas : je connais Paris. J'y suis passé en 40 quand j'était soldat

Tout Eiffel... Arc de Triomphe..Notre-Dame etc défilent lentement prise sous un angle bizarre comme si elles resurgissaient de la mémoire

Beuglements de vache

Voix : quelle belle bête
Autre voix : félicitations...
Autre voix : ça c'est de l'élevage
Autre voix : tout un métier
Autre voix : ça mérite d'être présenté au concours général de Paris

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Toit du hall du palias de Versailles
Pancartes suspendues portant noms des races charollais, limousines,...
Au dessous des pancartes, les bêtes sont alignées.
André installe la sienne, puis regarde devant lui

Taureaux, vaches, béliers, porcs....
poules, canards, oies... Vins fruits,
fromages, ????

Meuglements et brouhaha

Musique jouée par la garde républicaine.
André (à lui-même) : tous les chefs-d'oeuvre de l'agriculture sont là

Musique + cris d'animaux

André, près de sa vache, examine l'heure à sa montre. Il est impatient.
Jean s'approche de lui, admire la bête

Jean : salut André
André : salut Jean
Jean : Bravo, elle est belle ta frisonne...mais qu'est ce que tu fabriques là, alors qu'il y a tant de belles choses à voir.
André : j'attends mon cousin. Je lui avais écrit. Je pense qu'il va venir

Un gosse de la ville parcourt l'étable un prospectus à la main. Il est intéressé
Deux paysans sont intéressés aussi
Deux commis assis dans le fourrage bavardent appuyés sur leurs fourches

Jean : penses-tu ! les parisiens ils s'en foutent pas mal de la vache c'est bon pour les gosses...
1er commis : tu es déjà venu à Paris toi?
2eme commis: oui, il y a 2 ans...mon patron avait eu me 1er prix
1er : et qu'est-ce que tu as vu à Paris ?
2éme : pas grand chose, tu sais...on n'avait pas le temps et puis je ne connais personne
1er : c'est beau.... c'est grand ?
2éme : il y a des hectares de rues et un monde...mais il faut faire attention: méfiance

André sourit, puis déception (ce n'est pas sont cousin). Il reprend sa faction
Les jurés entourent les animaux sélectionnées, notent, vont, viennent, s'affairent
André, de dos, s'occupe de sa vache qui mange tranquillement

Ambiance salon

Il sursaute, se retourne et répond tristement

Voix off: André
André : salut
La voix off : alors, c'est pour cette fois, le premier prix
André : tu parles

Il abandonne son interlocuteur pour revenir à sa bête

Il caresse le dos de la bête. La main tâte le beau poil luisant et quitte l'animal.
La vache seule rumine dans le hall. Elle suit des yeux son maître qui s'éloigne

André (à sa vache): viendra plus, maintenant, va....
off : ... faut y aller : sacré cousin

 

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André sort du Palais, il traverse le boulevard animé, passe devant marchande de fleurs, a une hésitation, ne s'y arrête pas. Il regarde le kiosque à journaux et s'engouffre dans le métro. Il descend en courbe avec précaution.
Foule autour de lui

Bruit de voitures

Une grande affiche sur les guides des tropiques. André apparaît au pied de cette affiche.
Arrivée d'une rame. André monte dans une voiture. André dans la foule qu'il domine d'une tête. Figures blasées et avachies des ouvriers contrastant avec le visage étonné et plein de santé d'André qui remarque l'attention des hommes à leurs journaux, le manque de courtoisie, l'obsession du bruit et des trépidations de la plaque d'émail indiquant les stations s'agite sans arrêt. Le métro s'arrête, se vide, se remplit de nouveau. André est de plus en plus mal à l'intérieur.

Ambiances intérieures

André sort rue Saint-Denis.
Il s'aperçoit qu'il s'est trompé
Il essaie de demander son chemon, hésite.
Finalement s'adresse à un homme qui courrait presque. L'homme ne s'arrête pas.
Une autre personne le renseigne.
André remercie et s'engage dans la direction indiquée.
Sur le trottoirs, putains et gens louches, camelots et mendiants, femmes et marmots
André essaie de traverser la rue au préil de sa vie entre les voitures qui ..encent
Voitures de 4 saisons, prix exhorbitants.
André avance. Il sourit et s'arrête.
Il lève les yeux : c'est un arbre pleins d'oiseaux

Bruit de boulevard

André est heureux mais une idée lui passe par la tête. Son sourire disparaît. Il s'enfuit.
Les oiseaux sont toujours là mais les gens passent sans les voir. Ils vont à leurs affaires, à leurs misères
L'arbre demeure

Bruit des oiseaux sur bruit boulevard

Au salon, les paysans lauréats sont en train de traire leurs vaches
André arrive
Un groupe de paysans discutent. André écoute tandis qu'il trait sa vache

Bruit - meuglements
un paysan : il y a de quoi se mettre en colère
un autre : on ne nous paye pas nos produits sous pretexte.....

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...prix général
un autre : et les gens des villes restent indifférents à nos problèmes
un autre : on ne peut plus cultiver pour eux les campagnes

La discussion se poursuit tandis que la nuit tombe...

Le cousin d'André est installé dans un fauteuil du salon

Cousin : tu comprends bien, André, que je n'ai pas eu le temps d'aller au salon... et puis je les connais tes vaches. Je les ai vues quand nous sommes venus en vacances chez toi....

André est en face de lui. Ils boivent le café du soir. La femme du cousin regarde la télévision

André : oui, bien sûr...Remarque cette vache là est un peu spécial... le couronnement de la carrière. Un travail de 30 ans auquel mon père a déjà participé
Cousin : je ne savais pas...tu sais, nous autres dans les villes nous ne savons pas grand chose de votre métier. On mange vos produits, un point c'est tout. ça doit marcher d'ailleurs parce que vous vendez tout tellement cher...
André : tu parles...tu sais combien je gagne par mois dans la ferme ?
Cousin : ah non, combien ? c'est difficile à dire ?
André : et bien 70.000 mon vieux et encore nous avons une bonne ferme et je connais bien l'ouvrage
Cousin : c'est un peu moins que moi et je n'aurais pas cru. Vous devriez le dire. Moi, je gagne 95.000 par mois.
Allons, au lit, je dois me lever tôt demain matin

Ils se lèvent tous les 2. Ils vont à la fenêtre et contemplent Paris.
Voitures et lumières dans la rue

Ambiances rue

André se retourne dans son lit de ville.
Yeux fermés, lueurs intermittentes passent sur son visage venant d'un éclairage du néon de dehors

Enchainer

Machines agricoles qui descendent les Champs Elysées devant l'Arc de Triomphe illuminé

Musique
 
Voix d'André : un jour, un jour viendra où l'on applaudira les paysans sur les Champs Elysées. Les gens des villes et les gens de la campagne s'entendront bien et la vie sera plus belle pour chacun

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...de tendrement des bourgeons des fleurs du printemps
André séloigne parmi les arbres...

On retrouve André près d'une bonne vieille vache ordinaire : il lui tâte le dos

Il s'éloigne avec la vache dans la campagne printanière

Calme campagnard
... Fini de rêver...le travail vient avec le printemps

... ma pauvre vieille c'est pas encore pour demain qu'on ira ensemble au concours général à Paris
...mais ça fait du bien d'y rêver quelques fois

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