Pension équestre de la Nourotte, rue du Lavoir, 95450 Guiry-en-Vexin 07 89 43 80 93 rom.huppe@sfr.fr
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La grande ferme de Guiry dite « Ferme du château » dans les années 50

Présentation

C’est une exploitation Agriculture-élevage de 145 ha: 100 ha en culture et 45 en élevage très bien délimités, les terres cultivées sur le plateau, le long de la nationale 14, les prés dans la vallée, le long de l’affluent de l’Aubette appelé ru de la Défonce.

Il est curieux de signaler le nombre de propriétaires qui se partageaient ces terres lors de la reprise de cette ferme en 1946 : 17 !! soit 103 ha pour le château et 42 ha pour 16 autres !!Pourquoi ce dernier chiffre? Une rapide recherche a permis de comprendre que ces derniers étaient tous des descendants des anciens petits cultivateurs ou manouvriers de la commune...a la fin du XVIIIe siècle en effet il y avait une quinzaine de familles qui vivaient de la terre.

1955 ferme du château

Voici quel était en 1950 l’assolement approximatif à cause du remembrement (triennal) de l'exploitation : blé : 35 ha ; betterave sucrière 10 ha; betterave sucrière 10 ha, betterave fourragère 6 ha ; pomme de terre 4 ha ; céréales secondaires (orge et avoine) : 30 ha ; luzerne : 15 ha ; total 100 ha de terre labourable ; les 45 ha restant étaient des prairies naturelles. Aujourd'hui ces prairies naturelles n’existent plus : elles ont été transformées pour les trois quart en bois, pour le reste en terre labourables. Nous verrons plus loin pourquoi.

Le remembrement de 1949/50 a bouleversé l'état parcellaire des terres labourables, les herbages - non remembrés - étaient d’un seul tenant. Pour les premières, on a essayé de constituer grosso modo 10 parcelles de 10 ha, soit 100 ha facilitant énormément le travail.

Les bâtiments

En entrant par un grand portail face à l’église, on découvrait une grande cour carrée très caractéristique en Vexin français.

+ Sur la gauche, un hangar charretterie pour le matériel, plus loin atelier et garage pour les tracteurs. Au fond grande écurie pour 9 chevaux ; sur sa droite la maison d'habitation. Il est intéressant de signaler que le mur mitoyen entre la maison et l'écurie avait été percé d’une petite fenêtre carrée permettant de surveiller éventuellement les chevaux durant la nuit.

+ A droite du portail et tout au long de la route se trouvaient une série de bâtiments comprenant grange a betteraves, au-dessus stockage du blé en vrac ; plus loin espace pour préparer la nourriture du bétail, provende et grains concassés ; en suivant ancien manège utilisé pour les semences et leur préparation : plus loin emplacement de la betterave avec stockage des gerbes de chaque côté ; plus loin encore cave à pomme de terre avec grange à foin en vrac au-dessus ; enfin cellier équipé de barriques et de tonneaux à cidre : deux barriques de 600 l, 4 pièces de 220 1 , plus quelques demi-pièces. Il faut dire qu’une partie du pur jus était transformé en « calva » comme il est dit dans le chapitre de la moisson, c’était une tradition.

+ Sur la partie droite de la cour s’étalaient les étables à vaches pouvant loger une quarantaine de bêtes, grenier à foin au-dessus naturellement. En suivant il y avait sous le même toit : bâtiment à outils manuels, laiterie et bouverie pour deux paires de bœufs, au-dessus de tout cela ancienne chambre à grains parquetée qui a servi entre autres de salle de réunion ou de spectacles en attendant la construction du Foyer rural. derrière tout ce côté de bâtiment était une cour étroite utilisée autrefois pour l'élevage des cochons.

+ En bout de tout cela et en retour sur la cour, donc face au portail, un joli petit bâtiment avec fenêtre en ogive (où) se trouvait le bûcher avec une grande cheminée où l’on faisait cuire les petites pommes de terre pour les petits animaux ; au dessus c était la chambre à tourteau. En arrière de ce petit bâtiment s’étendait la basse-cour assez vaste d’ailleurs, une mare, alimentée par une eau de source, permettait l'élevage des canards. au fond de cette cour un espace grillagé pour les pigeons.

Pour terminer cette description, il reste à signaler les anciennes bergeries construites à l'équerre et en arrière de la maison d'habitation. Elles ont été transformées par la suite en étable d'été pour les vaches laitières avec traite mécanique et laiterie.

Tous ces bâtiments ont été construits de façon rationnelle à la fin du XIXe siècle, ceux qui longent la route sont du XVIIIe siècle. Les améliorations apportées en ce milieu de XXe ont été bénéfiques et auraient pu servir longtemps encore. Cette ferme était vraiment l'exemple typique en Vexin français. En 1970 malheureusement une affaire de succession chez les propriétaires a anéanti cet espoir ; malgré quelques transformations inesthétiques, il reste de nombreux bâtiments voués à la destruction et à l'abandon.

L'exploitation

La main d'œuvre : en 1950 elle comprenait un vacher aidé de sa femme en été ; en hiver un journalier travaillait en plus pour soigner tout le bétail, une centaine de bêtes à cornes ; puis un chauffeur de tracteur ; un journalier spécialisé susceptible de remplacer l’un ou l’autre ouvrier manquant ; un charretier, en effet une attelée de chevaux avait été conservée pour employer cet homme qui n'avait pas d’autre qualification ; un autre journalier non spécialisé ; 2 ou 3 saisonniers bretons ou italiens pour le binage et l’arrachage des betteraves et le ramassage des pommes de terre.

Les bovins

Ceux-ci ont une grande importance dans l’économie de l'exploitation. bien que les surfaces en cultures soient le double de celles en herbage, les revenus de l'élevage atteignent 60% des revenus totaux.

On compte cette année là : 38 vaches laitières françaises Frisonnes Pie Noire, c'était l'appellation officielle (anciennement hollandaises), 18 génisses de deux à trois ans,18 génisses de 1 a 2 ans plus les veaux de l’année, en principe le nombre de vaches.

Par la suite les veaux mâles furent vendus en bas-âge. Tous ces animaux représentaient un capital, il est vrai. L'étable : comme il est dit plus haut, l’ancienne bergerie située en bordure des prés avait été transformée en étable d'été. Pour l'hiver les vaches laitières occupaient l'étable dans la cour de ferme, la fosse à fumier et la citerne étant à proximité. L'étable venait d'être entièrement transformée selon le système hollandais (voir photo). On s’est vite aperçu que ce système encouragé par le génie rural de l’époque présentait des défauts. Ainsi il a fallu poser des couvercles sur les abreuvoirs, ajouter un rebord pour empêcher les vaches de glisser dans le caniveau et remettre le sol à plat. Enfin on s’est aperçu que les abreuvoirs auraient dus être encastrés dans le mur parce que les bêtes se cognaient dessus en se relevant. A noter que les étables étaient désinfectées et blanchies avant la rentrée des bêtes et que tout animal contagieux ou douteux était isolé dans un petit local dit infirmerie. La race : Française Frisonne Pie Noire était celle élevée dans tout le Vexin, toutes ses qualités en faisaient la race idéale pour sa rusticité et sa production laitière. Cette année là la traite se faisait encore à la main mais elle ne tardait pas à être mécanisée…

N'empêche qu'en cette année 50 l’étable avait obtenu le premier prix régional de la propreté et de la qualité du lait lequel était rafraîchi à l’étable par un serpentin à eau fraîche.

La sélection est la base de tout élevage intensif et rationnel. nous allons voir quatre points en rapport avec la sélection.

A) l’origine du bétail : celui-ci est totalement inscrit au Herd Book ? de la race bovine hollandaise pie noire lequel poursuit 5 buts : maintien de la pureté de la race et de la conformation ; amélioration des aptitudes laitières et beurrières par le contrôle laitier obligatoire ; garantie des ascendances avec déclaration de la naissance des veaux dans les 48 heures et déclaration des saillies dans les 6 mois ; contrôle des importation des reproducteurs.

B) La reproduction : se pratique par l’insémination artificielle avec le centre de Magny appelé coopérative d'élevage du Vexin fort bien géré sur le plan zootechnique, sanitaire et économique.

C) Le contrôle laitier : c’est la base de la sélection car il détermine au bout d’un an les laitières à garder et celles à éliminer. C’est un tri, une sélection indispensable à tout élevage intensif. Le contrôle laitier sert aussi à la descendance, par l’insémination artificielle, à choisir un taureau soit beurrier soit laitier.

D) L'alimentation : ici le veau est élevé au lait de sa mère maïs dans un seau. À deux mois on ne garde que les femelles qui recevaient un lait corrigé fabriqué par la maison Sanders ; elles sont sevrées à trois mois. à 6 mois ces jeunes génisses reçoivent un tourteau d'élevage riche en condiments minéraux, de l’ensilage et du foin. De 1 à deux ans elles auront de l’ensilage-luzerne au mois, du grain et du foin à volonté.
Sans rentrer dans le détail, la ration établie pour les vaches laitières était établie pour une vache pesant 650 kg de moyenne. La méthode des unités fourragères semble apporter au mieux les principes nutritifs nécessaires.

Il serait trop long d’expliquer le calcul d’une ration d'entretien et de production en unités fourragères, aussi je joins à titre documentaire les études faites à la ferme à cette époque. vous remarquerez le sérieux de la recherche en matière d'alimentation des vaches laitières. Des résultats d'analyses et des essais effectués à la ferme compléteront ces études.

E) Ecoulement des produits : le lait est vendu à la laiterie de Magny dite SAFR (société anonyme des fermiers réunis) par l'intermédiaire d’une coopérative fictive crée par tous les producteurs de la région ; ainsi cette coopérative au nom des producteurs traitait directement avec la laiterie des conditions de la réception du lait et du prix à payer.

Les équidés

De 194 à 1950 l'écurie était tombée de 9 à 4 chevaux à cause de la motorisation. : une attelée de trois chevaux pour un ancien charretier et un cheval de bricole affecté aux menus charrois de la ferme. L'histoire du cheval de ferme du Vexin français a été racontée dans une petite étude écrite en 1996, déposée au service de l’Inventaire.

L'écurie est bien aménagée pour les quatre chevaux restants ; la place disponible est convertie en atelier de réparations.

Il est intéressant de signaler qu’un lit suspendu existe toujours dans le coin à droite de la porte à coulisse de l'écurie ; il y avait le même à l’étable. De mon temps personne n’y couchait plus. A l'origine ce lit était réservé au charretier ou vacher célibataire, maïs les lois sociales en agriculture avaient interdit cette utilisation dans les années 20 je crois.

Les cultures

L’assolement

Normalement on pratiquait l’assolement triennal, mais des variations importantes ont été apportées, d'une part, a cause du remembrement qui a tout bouleversé et d'autre part à cause des différences de qualité des parcelles de terre dans lesquelles il n'est pas possible de cultiver telle ou telle plante ; par exemple il n’est pas possible de faire pousser des betteraves dans un sol pauvre et peu profond. Par ailleurs sachons que les éléments de base pour un bon assolement ont été observés soit :
* éviter la fatigue du sol, les dégâts des insectes et maladies parasitaires. En effet les mêmes plantes ne doivent pas revenir trop souvent sur le même sol.
* satisfaire les exigences alimentaires de la culture. La plante à racine profonde comme la betterave s’alterne avec celle à racine superficielle comme le blé par ex.
* enfin on applique la même principe entre plantes dites nettoyantes et plantes salissantes, exemple le pois, céréale.
Un peu plus tard lorsque ces problèmes dus au remembrement furent résolus et en mettant hors assolement quelques ha de mauvaise qualité, on suivra l’assolement triennal classique de la région : 1ère sole 30ha, 2ème sole 30 ha, 3ème sole 30 ha.

Dans la première sole, on mettra Les plantes sarclées ou celles prises comme telles : betteraves sucrières, betterave fourragère, pomme de terre, féverolle, maïs, la luzerne couvre le reste de cette sole.

Dans la seconde sole, on mettra les 30 ha en blé. C’est une bonne place puisque les plantes sarclées précèdent et la luzerne est un bon précédent du blé.

Dans la 3ème sole de 30 ha seront les céréales secondaires, orge et avoine avec semis de luzerne incorporée.

Raisons du choix de ces cultures :

Blé : céréale fondamentale qui a toujours une récolte moyenne avec un bon prix rémunérateur.
Orge : en raison d’un contrat de semence avec une maison de s élection qui offrait un prix rémunérateur de 10% au-dessus du prix marchand. De plus l’orge non commercialisé servait à l'alimentation du bétail.
Avoine : elle servait bien sûr à l'alimentation des chevaux, l'Energie de la ferme. Environ 1/5 de la production était incorporé au concentré pour vaches laitières. Le reste allait à la basse-cour ou était vendu.
Luzerne : c'est un fourrage excellent pour l'hiver et un ensilage de grande qualité pour les vaches laitières.
Féverole : d’une bonne valeur alimentaire pour les vaches dosant presque une unité fourragère et 220 de matière azotée
Betterave fourragère : bon aliment pour les bovins
Betterave sucrière : mis à part le revenu économique elle est cultivée pour son sous-produit la pulpe, laquelle apporte un complément de nourriture à bon compte
Pomme de terre : cultivée pour l'alimentation humaine en partie. On cultive aussi la pomme de terre à fécule qui est traitée dans une féculerie. Le sous produit genre pulpe est utilisé pour les bovins
Maïs : il s’agit la du maïs fourrager qui ensuite est un excellent aliment pour les laitières.

La ferme de Guiry a toujours été considérée comme une ferme pilote d’où de nombreux essais en ce qui concerne l’agronomie, de fumure minérale et de densité de semis. en ce qui concerne l'élevage de nombreux tests ont été faits avec des hormones ou des protéines iodées pour déceler la nocivité de ces produits ; dans le lait également une recherche a été effectuée pour mesurer la déminéralisation des vaches laitières par l'étude du poil etc

Les Machines en 1950

Description sommaire
A) Energie animale : il y a encore 3 chevaux pour les raisons indiquées plus haut, de plus cela permet d'utiliser encore de nombreux outils aratoires : charrue, semoir, outils de plantation etc
B) Energie mécanique :
- un gros tracteur semi diesel de 40 cv qui demande certaines précautions sur route notamment.
- un petit tracteur à pétrole 18/24 cv Allis chalmers des surplus américains système trois roues ( voir photo). Il est équipé de plusieurs plusieurs matériels adaptés :
charrue , bineuse, faucheuse etc ; il est très maniable.
- un Dodge de l’armée américaine équipé d’un chargeur à l'avant pelle et fourche. Système très commode qui épargne bien du mal pour toutes les manipulations physiques.
- une jeep (également de l’armée américaine utilisée pour des travaux légers et équipée d’un pulvérisateur à moteur auxiliaire
- en outre l'équipement intérieur de la ferme comporte 6 moteurs électrique de 1 à 18 cv dont un 12 cv sur brouette.
C) outillage extérieur
a) de labour : 3 brabants, 2 déchaumeuses à disque, une charrue double, deux charrues simples etc
b) de semaille et plantation, deux semoirs à grains, une planteuse de pommes de terre automatique
c) d'engrais et de traitement : deux distributeurs d’engrais, un pulvérisateur sur jeep
d) de travaux superficiels : 5 herses, 2 canadiens, 3 bineuses, 3-bmreuses, 1 buteuse, 1 pulvérisateur à 32 disques, 4 rouleaux, 1 émotteuse etc
e) de récolte : 2 faucheuses, 1 faneuse, 1 lieuse de 2m10, 1 moissonneuse batteuse 1m50 de large marque Allis Chalmers (même moteur que le tracteur, 1 arracheur de pomme de terre etc...
f) de transport : 4 tombereaux dont trois à pneus, une remorque à tracteur, 2 gerbières farinières, 2 chariots à 4 roues
D) outillage d'extérieur de ferme
a) récolte : 1 batteuse, 3 tarares, 1 trieur
b) manutention : 1 presse ramasseuse de foin ou paille, 1 élévateur expulseur à ventilation, 2 pompes etc
c) préparation des aliments du bétail : 1 concasseur, 1 aplatisseur, 1 hache paille, 1 coupe racines, 1 brise tourteau, 1 cuiseur à vapeur.

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Les organismes qui ont suscité le progrès

Juste après guerre ce sont des organismes privés qui ont permis une véritable révolution dans la façon de travailler, de produire et de gérer.
Le premier organisme fut l'I.O.S.T.A, institut pour l'organisation scientifique du travail en agriculture. En 1948 son fondateur disait « nous allons vers un régime de larges échanges internationaux et tout le monde sent la nécessité d'élever le standard de vie à la campagne. Il faut donc à tout prix, pour réussir, organiser le travail avec plus d'ordre et de méthode ». D'où de très nombreux thèmes d'organisation basés sur des recherches scientiques (scientifiques?) comme par exemple : la prévision dans le travail, l'aménagement des bâtiments agricoles, la rationalisation du matériel, la sécurité à la ferme, sans oublier les facteurs en agriculture et la formation du chef d'entreprise.

Tous ces problèmes qu'il fallait résoudre ont donné naissance à différents mouvements ou services comme le CETA, centre d’études technique agricoles (celui de Magny-en-Vexin fut le deuxième crée en France). Sans vouloir dénigrer les services officiels émanant du ministère de l'Agriculture, il faut avouer que les CETA étaient très en avance sur ceux-ci tant en agronomie qu’en pratique d'élevage.

Le CETA de Magny groupant une douzaine d'agriculteurs parmi les plus évolués, il s'était adjoint un ingénieur en agronomie et un autre en élevage. Les cotisations versées étaient très largement compensées par les services rendus.

Sur le plan pratique, il faut aussi signaler l'élaboration du dossier « Champ », véritable carte d'identité de chaque parcelle de culture sur laquelle était transmis le relevé cultural, le plan de la pièce cultivée, les améliorations à apporter, soit un aide-mémoire indispensable.

D'autre part en matière d'élevage a été crée le « dossier vache » comportant à l'intérieur les prémunitions des maladies (vaccinations), la reproduction, les vêlages, les produits, les lactations, les interventions diverses etc.

Le dynamisme des agriculteurs a provoqué la création dans les années 50 d’une coopérative agricole de stockage et d'approvisionnement ayant son siège à Magny, auparavant toute la région était partagée entre la coopérative de Pontoise et celle de Mantes. Et puis d’autres organismes te le Crédit Agricole, la Mutualité sociale agricole et les assurances mutuelles ont très vite trouvé pignon sur rue à Magny.

Il faudrait aussi signaler dans le même temps la naissance de
- la Coopérative d'élevage du Vexin (centre d’insémination artificielle)
- de la coopérative fictive laitière crée pour discuter de la commercialisation du lait avec la laiterie dite des « fermiers réunis », installée à Magny
- de la coopérative des éleveurs, fondée par un agriculteur d’Arthieul, destinée à la commercialisation de la viande avec une boucherie établie à Mantes, lieu important de consommation.
- une coopérative de marnage installée à Charmont

Enfin en matière de vulgarisation agricole, la chambre d'agriculture a pu installer quelques années plus tard un cercle agricole susceptible de toucher l’ensemble des agriculteurs en matière d'agronomie et de gestion. Et pour tout dire, il a existé et existe toujours d’autres organismes privés pour la recherche, l’expérimentation ou la gestion agricole.

Tout cela pour dire que le monde agricole de la région de Magny a bien provoqué un formidable progrès.

Conclusion

Le Monde paysan c’est toute une civilisation, du moins c'était cela, dans notre région jusqu'au milieu du XXe siècle.

Le paysan connaissait sa terre mieux que quiconque, rien qu'à son odeur quelque fois, odeur différente selon les saisons. Il l’aimait cette terre dont il était issu, patrimoine chéri de ses aïeux, souvent acquis au prix de la sueur et du sang. Il avait les mêmes sentiments s’il n'était pas propriétaire du bien qu'il exploitait.

La terre il la respectait, il ne fallait pas la « violer » comme il disait - c’est un terme que j'ai souvent entendu - ça voulait dire qu’on ne devait pas la travailler à contre temps lorsque par exemple elle était trop humide ou trop sèche ; il fallait savoir attendre, les saisons arrivaient toujours à temps.

Toutes les connaissances de notre métier provenaient de sentiments innés, notre génération en était convaincue. Pour ma part je suis fière de l’origine paysanne et vexinoise de ma famille qui remonte sans interruption à plus de 400 ans.

Comme beaucoup de mes collègues, éduqués au mouvement de la J.A.C j'ai considéré mon métier comme une mission : perpétuer la Création au sens noble du terme, sans être désintéressé bien sûr, le seul profit n'étant pas un but en soi.

Un vieux syndicaliste à l'époque me disait : « Le jour où le profit s’installera chez nous en maître, le métier sera foutu ». Pouvait il aussi bien dire! Cet appas exagéré du gain a commencé dans les années 70, date à laquelle j'ai été obligé de quitter la ferme dont je vais essayer de raconter la vie professionnelle de 1945 à 1970.

Mais à partir des années 60, les premières difficultés économiques concernant l'élevage c'est à dire que le prix du lait non garanti, l'augmentation sensible du prix des tourteaux entre autres provoquèrent une désaffection de cet élevage bovin surtout chez les petits éleveurs mal équipés. Dans les élevages plus importants on remplaça la production laitière par une spéculation plus rentable et surtout moins astreignante : l'engraissement ou plus exactement la viande. ce changement de production amena très rapidement la disparition de la coopérative d'élevage (insémination artificielle) et de la coopérative du lait.

Et puis un autre problème plus grave encore fut la disparition progressive des petites fermes. On attribue ce phénomène aux charges globales à l’hectare beaucoup trop lourdes de ces exploitations qui n'avaient pas su ou pu se moderniser à temps. Ce phénomène fut un bouleversement dans la vie sociale agricole, un exode rural en quelque sorte qui priva les communes d’une partie de ses forces vives dans le domaine familial et humain.. Un seul exemple suffit : dans une commune voisine il y avait juste après guerre 9 exploitations, quarante années après on en dénombre 3 !!!

Aujourd'hui, mais pour d’autres raisons, la disparition des fermes continue, il s’agit de fermes de moyenne importance, rentables mais sans succession familiale . Mais pourquoi? I faut avoir le courage de dire que c’est à cause de cet appât de gain, de ce profit exagéré dont je parlais au-début de l’exposé. Sans vouloir entrer dans le détail et malgré les lois sur le cumul d'exploitations il est impossible à un jeune agriculteur, éventuel repreneur, de trouver les fonds nécessaires à son installation, il est vite dissuadé par les conditions financières exigées ; seules les grandes exploitations de plusieurs centaines d'hectares peuvent reprendre ces fermes et s’agrandir encore.

Un mot simplement pour parler de l’évolution technique incroyable qui, aujourd’hui dans notre région, permet à un exploitant, seul de cultiver 150 ha il y a 50 ans il en fallait 10 … On parle et on parlera longtemps de chômage…
que faut-il penser de tout cela? Les beaux rêves d'après guerre se sont-ils évanouis?

Oui et non

Oui parce que le progrès est allé trop vite, Non parce que cette courte époque d'après guerre a favorisé et développé tout un courant de solidarité, d'accès au bien commun et pourquoi ne pas dire un climat d'amitié, alors que le paysan est traditionnellement individualiste.

Il est vrai que les 5 années 39/45 avaient été une rude épreuve où l'on ne pouvait rien construire mais on aspirait à un mieux être dans la liberté.

C'est pourquoi ces 20 années qui ont suivi ont quand même été exemplaires pour le Vexin.